BLANCHIMENT D’ARGENT, TECHNIQUE DU CASH QUI PAIE UNE CHAMBRE D’HÔTEL VIDE

M.X construit un hôtel à Assinie et décide que ses chambres seront tarifées à 200 milles la nuitée. Un tarif excessif comparativement à des offres étrangères bien plus alléchantes. Personne au monde d’autre que lui, et éventuellement ses financiers ne peuvent changer cette donne. C’est sa politique tarifaire et il est libre : « vous n’êtes pas la cible ». Il a par exemple 60 chambres.

Il sait pertinemment qu’en Côte d’Ivoire, le taux de bancarisation est d’environ 20%. Ce taux correspond au pourcentage des ménages ayant au moins un compte en banque. Son hôtel balnéaire s’adresse à une clientèle plus touristique que d’affaires. Il a donc de fortes chances d’être occupé par des touristes locaux et étrangers. Ces derniers paieront, pour beaucoup par cartes de crédit, mais le gros du lot, les touristes ivoiriens, comme on le sait tous, fonctionneront avec du cash.

Et c’est là que tout se joue…

Pour rappel, le blanchiment est généralement défini comme l’introduction des bénéfices d’activités illégales dans des circuits économiques légaux pris en compte par la comptabilité nationale. L’objectif du blanchiment est de donner une apparence légitime (propre) à des fonds illégaux (sales) en les faisant changer de statut. La compatibilité de l’hôtel de M.X, déclare aux impôts que son taux d’occupation de ses chambres est de 90%, que la fréquentation de son restaurant de X %, des autres activités nautiques de Z%. De bons chiffres d’affaires sur lesquels seront payés des impôts.

Mais en réalité ces chiffres sont fictifs, et les couts de revient, sont également fictifs, gonflés par les charges « virtuelles ». Sans les gonfler il ne retomberait pas sur ses pieds. Il faut une grande expertise comptable pour bien ficeler ce type d’affaires, et ce n’est pas ce qui manque. Par exemple la compatibilité déclare qu’elle a enregistré 10 heures de sortie en jet-ski à 5000 FCFA l’heure et entraînant la consommation de X FCFA en carburant. Elle passe en encaissement physique les 50.000 FCFA, mais il n’y a eu aucune sortie en jet-ski ce jour là. Et il en sera de même pour les occupations de chambres et autres services. De quel moyen le pôle pénal économique et financier, ainsi que le CENTIF-CI dispose pour savoir si de 02:00 du matin à midi le dimanche 05 février 2023, la chambre 210 a été physiquement occupée et les joyeux fêtards présents y ont consommé pour 500 milles FCFA en champagne ? Aucun sauf mettre un agent des impots devant chaque chambre !

Donc circulez y a rien à voir, la compatibilité de M.X affirme que son chiffre d’affaires est de tant de milliards de FCFA par an, ses charges ( en partie fictives ) de tant de milliards, et l’origine des fonds en cash entrées en caisse est celle des touristes, donc parfaitement licite. En 2018, le groupe AccorHotels a déclaré par communiqué suite à des allégations de blanchiment, mettre en oeuvre des « mesures de vigilance accrue sur les flux financiers qui pourraient avoir une origine ou une destination délictueuse », alors qu’une enquête de presse faisait alors état de liens d’affaires entre le groupe hôtelier français et la famille du président azerbaïdjanais.

Nota : ceci est une publication grand public simplifiée. C’est en réalité un peu plus complexe que tel que décrit mais le modus operandi est bien réel.

JCK